1339

Confirmation des franchises, privilèges et libertés de la ville de Sion.

Confirmation des franchises, privilèges et libertés de la ville de Sion en 1339

La confirmation des libertés, privilèges et franchises de la ville de Sion par l’évêque représente une étape importante dans l’acquisition de l’autonomie de la commune vis-à-vis du pouvoir épiscopal.

Venu du Périgord, Philippe de Chambarlhac, aussi appelé de Gastons, est placé sur le siège épiscopal de Sion par le pape pour succéder à Aymon III de la Tour, en 1338. Il existe deux rédactions de ces libertés et franchises: une première datée du 4 juillet 1338, peu de temps après la nomination de l’évêque Philippe de Chambarlhac, où celui-ci est représenté par son vicaire; puis la seconde, celle-ci, du 12 mars 1339, à la suite de la véritable prise de possession du diocèse par le prélat. En effet, après que l’évêque est installé à Sion, les bourgeois lui demandent confirmation de leurs libertés, des libertés déjà en vigueur depuis un certain nombre d’années, « de mémoire d’homme » pour reprendre la formule de l’acte. Ceci devient ensuite une tradition, à chaque élection épiscopale.

Nous nous trouvons donc, à Sion, dans la maison de feu Jean dit Curto, bourgeois, le 12 mars 1339, en présence des deux syndics et procureurs de la cité et communauté de Sion, François Montellyer et Perrod Magy. Lesdites franchises et libertés sont examinées et approuvées par deux commissaires spéciaux, mandatés par l’évêque, Denis de Thora, chanoine de Sion et official, et Guillaume Augerii de Grossa, juriste. Le but de cette enquête minutieuse est de s’assurer que ces franchises et libertés sont bel et bien en vigueur depuis longtemps et qu’elles ont déjà été reconnues par les évêques précédents.

Plusieurs témoins assistent à l’événement: l’abbé de Saint-Maurice Barthélemy, Henri de Chastoney, chanoine de Saint-Maurice, Elie de Chambarlhac, vicaire épiscopal et accessoirement frère de l’évêque, maître Guillaume de Grossa, juriste, Perrod de Saint-Maurice et François Montellyer, bourgeois de Sion et notaires publics, Jean d'Orsières, Nicolas de Valère, Martin Luyers et Hugues de Drona, bourgeois de Sion, Pierre, sautier de Mörel, et plusieurs autres. Les témoins signent le 13 mars dans la salle supérieure du palais épiscopal. Deux notaires, Jean Corderii, notaire apostolique, et Gérard de Dallyon, notaire impérial, apposent leurs seings, petits dessins propres à chaque notaire, visibles en bas à droite du document.

L’acte sur parchemin porte, en bas à gauche, le sceau épiscopal ovale de cire rouge, pendant sur lacs de soie verte; au centre, des lacs de soie verte et rose et, à droite, des lacs de soie rose, ont un jour été munis des sceaux du Chapitre et de la Régalie qui manquent actuellement.

Que contiennent exactement ces franchises, privilèges et libertés ? A dire vrai, leur contenu est relativement hétéroclite.

  • Certains articles consacrent véritablement la liberté et l’autonomie des bourgeois par rapport au pouvoir de l’évêque. Ceux-ci ont ainsi officiellement le droit de s’administrer eux-mêmes, d’édicter des statuts et de les renouveler, de se choisir des procureurs et syndics, sans se référer à l’autorité d’un supérieur.
  • D’autres articles concernent le droit pénal et privé, reprenant certains des statuts précédemment édictés, en 1217: ils fixent, par exemple, des amendes sanctionnant différents délits ou règlent les modalités de la succession d’un bourgeois mort sans descendant.
  • Certains cependant démontrent aussi un certain ascendant des bourgeois pris sur le pouvoir de l’évêque. Ainsi, l’article 10 prévoit que « si quelqu’un est fait prisonnier pour un autre motif qu’un vol notoire ou un homicide, ou un quelconque autre crime grave, les bourgeois de Sion peuvent interdire qu’il soit jeté en prison; avec l’aide des bourgeois, l’évêque le retiendra à l’intérieur de la ville, tant qu’il n’aura pas établi, assisté du conseil des bourgeois, s’il doit être emprisonné ou non. »

Ce parchemin original a, semble-t-il, vécu quelques aventures. En effet, après avoir mystérieusement disparu, il est retrouvé, par hasard, peu en avant 1880, comme le relate un article de la Gazette du Valais du 7 janvier 1882: « A ce dernier sujet, pour ne citer qu’un exemple, le hasard nous a mis personnellement en possession, il y a quelques mois, d’un document original très précieux, disparu on ne sait comment des archives de notre cité qui en sont actuellement redevenus propriétaires. C’était un grand parchemin, revêtu d’un sceau épiscopal et par lequel Philippe de Gastons évêque de Sion de 1338 à 1342, confirmait les franchises et les libertés de la capitale actuelle du Valais. »

Anne Andenmatten, archiviste de la Bourgeoisie de Sion